10.09.2012

Je suis un robot !

Le monde actuel est un espace mondialisé, à ce point qu’une bonne partie des 7 milliards d’humains qui peuplent la terre et maîtrisant plus d’une langue se prennent pour des experts en traduction. « Théoriquement, j’aurais pu traduire ce texte moi-même. Je ne peux pas le faire car je n’ai malheureusement pas le temps nécessaire. » Mais il y a eu mieux. Effectivement, c’est un client insinuant que la traduction effectuée pour lui par l’un de mes collègues serait une traduction automatique qui décroche la timbale. Le scénario ? Le voici :
Le client m’envoie un contrat rédigé en langue allemande. Il me demande de le traduire en français. Je fais appel à un collègue, traducteur chevronné, de langue maternelle française, moult années d’expérience dans la traduction juridique, etc. Le collègue me livre la traduction, non sans ajouter un certain nombre de remarques concernant des ambiguïtés rencontrées dans le texte source (ponctuation incomplète, il manque (si, c’est vrai !) des lettres (!), quelques incohérences de sens). Je fais suivre au client… Et voici ce qu’il me répond : « J’ai bien reçu votre traduction ainsi que les remarques du traducteur et vous en remercie. Par contre, je ne vous cache pas que la traduction sonne bizarre par endroits*. Êtes-vous sûr qu’elle a été réalisée par un vrai traducteur ? La structure des phrases, par exemple, ne correspond pas du tout à ce que j’ai appris à l’école. Le français n’est, certes, pas ma langue maternelle, mais j’ai bien l’impression que cette traduction est une traduction automatique. » !

Cher client, je vous demande à présent d’être très courageux, car je vais vous dévoiler toute la vérité, rien que la vérité :
La traduction que vous avez commandée et que nous vous avons livrée a – eh oui ! – évidemment été générée par ordinateur. C’est effectivement une traduction automatique. Car nous les traducteurs, nous SOMMES des automates, des robots. Nous avons une base de données terminologique intégrée qui nous permet de recracher, à tout instant, le vocabulaire demandé (« Hé, au fait, tu es traducteur, non ? C’est quoi déjà l’« action rédhibitoire » en allemand ? »). Nous sommes capables de vous pondre une traduction de 800 pages sur les réfractaires acides en un rien de temps, allez, je vous le donne en mille : en l’espace d’un week-end (« Ah bon ? Ça va durer aussi longtemps que ça ? »). En plus, évidemment, nous maîtrisons la totalité des langues européennes plus le chinois, l’arabe, berbère inclus, et le perse, pashai inclus (évidemment), et les langues (vraiment) exotiques telles que l’abénaqui, l’abkhaze, l’acaxee, l’adlirec, l’acadien, l’adyguéen, l’afar, l’agäw, l’agnéen, l’ai-cham, l’aïnou du Japon et l’aïnou de Chine, l’aja-gbe, l’addadien, l’aljamia, l’algonquin, le baza, l’éwé….dois-je m’arrêter ? …le bable, le bachkir, le baciroa, le bactrien, le badiaranké, le bai, le baïnouk, le balante, le bété … et j’en passe. Parce que l’alphabet est encore long, et dans le fond, vous ne voulez même pas le savoir (« Quoi ? Tu n’as que deux langues de travail ? A-t-on encore besoin de traducteurs pour l’anglais de nos jours ? »).
L’unique raison d’avoir pris une apparence humaine, c’est que nous voulons éviter d’avoir des voisins effarouchés lorsque nous sommes parfois obligés contre toute attente de quitter notre appartement, pour promener le chien ou sortir les poubelles, par exemple.
Certains robots-traducteurs partagent leur domicile avec un être humain. Il peut s’agir ici d’un partenaire de vie, d’enfants ou de parents. C’est plus convivial et ça peut être bien utile (évidemment) : ça sert lorsqu’on a une petite envie de faire la conversation et ça sert à absorber de nouveaux verbes, ça sert aussi (évidemment) à faire le plein de vocabulaire inconnu. Un autre avantage du compagnon humain, c’est qu’il nous évite de devoir passer à tout bout de champ à l’atelier de réparations pour faire ventiler nos mémoires de données, resserrer nos vis et faire astiquer les boutons correspondant aux nombreuses langues. Et, vous l’aurez deviné, cela peut être bien utile d’entretenir un tel compagnon humain lorsque notre intelligence artificielle est dépassée – notamment après que nous ayons planché sur un texte des plus complexes et très spécialisé – alors qu’il s’avère nécessaire de rédiger des remarques à l’attention du client. Logique, non ?
C’est pourquoi, je vous donne un conseil d’ami : ne vous fiez jamais aux apparences ! Il se pourrait bien que le voisin sympathique d’en face – vous le voyez assis à son ordinateur, le dos courbé, jour pour jour, travaillant du matin au soir, je dirais même du soir au matin ( !) – eh oui, que ce voisin-là n’est autre qu’un robot, un robot goulu qui, la nuit venue, se rue sur les poubelles de la ville pour y fouiner … et s’empiffrer des vieux dictionnaires qu’il déniche de sorte à les intégrer dans son système…crr-crr-crr, un cri rauque grince à travers l’obscurité…

Le mot de la fin :
Chers clients, surtout ne demandez jamais à un traducteur de vous fournir une vraie traduction effectuée par un vrai traducteur, en d’autres termes par un traducteur humain ; vous risquez de faire exploser son processeur. By the way, ce texte a été généré par une machine. Pour plus d’informations, veuillez contacter ChroniqueAutomatique@textmaster.fr.

* Note du traducteur :
En fait, le client a écrit « Da kommt mir einiges Spanisch vor », vu qu’il est Allemand et qu’il a rédigé son courriel en allemand (traduit littéralement, cela donne ceci : « Par endroits, cela me paraît être de l’espagnol »). Un client britannique y aurait peut-être vu une suite de mots helléniques ? (« It’s all greek to me », littéralement : « Cela me semble être du grec »).

 

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