10.12.2015

La Marseillaise – Mot du jour

Par définition, les hymnes nationaux ont pour but d’unir un people en créant un point de ralliement incarnant les valeurs auxquelles tous les citoyens peuvent se rattacher. Cependant, comme nous l’avons récemment vu lors de manifestations sportives organisées à travers le monde après les attaques terroristes de Paris, La Marseillaise a été entonnée en signe de solidarité avec la France. Si beaucoup reconnaissent les notes familières de cet hymne et si ses paroles sont parfois connues au-delà du monde francophone, La Marseillaise a une histoire très riche que beaucoup ignorent.

Initialement intitulée « Chant de guerre pour l’Armée du Rhin », cet hymne a été composé en 1792 par Claude Rouget de Lisle. Contrairement à de nombreux hymnes actuels, La Marseillaise n’a pas seulement été créée comme un hymne à la liberté et à la révolution (la Révolution française ayant en effet commencé trois ans plus tôt), mais également comme un appel au peuple à prendre les armes à la veille de la guerre de la Première Coalition. Ce « chant de guerre » s’est fait connaître sous le titre La Marseillaise parce qu’il avait initialement été adopté comme marche militaire par les unités de la Garde nationale venues de Marseille à leur entrée dans Paris au début de la guerre.

Si son statut d’hymne révolutionnaire n’a jamais été remis en question, ce n’est pas le cas de son statut d’hymne national. En raison de sa grande et immédiate popularité, la Convention nationale l’adopta comme hymne de la Première République (et premier hymne de la France) en 1795. Cependant, cela ne fut que de courte durée. La Marseillaise perdit son statut d’hymne national sous Napoléon (sans doute en raison de son ton révolutionnaire) une dizaine d’années plus tard, fut interdite sous la Restauration et remplacée pendant le règne de Napoléon III. Après la mort de ce dernier en 1870, l’hymne fut rapidement adopté par les révolutionnaires de la Commune de Paris. Même si la Commune ne dura longtemps, le retour de La Marseillaise dans la conscience nationale lui permit d’être adoptée définitivement comme hymne national français en 1879.

Si l’on considère le temps qu’il faut à la plupart des mots auxquels nous nous intéressons pour traverser la Manche, il ne fallut que deux ans à La Marseillaise pour faire son apparition dans la langue anglaise. Elle fut mentionnée pour la première fois dans The Times en septembre 1794. À peine plus de trois décennies plus tard, elle apparut dans le poème Copy of an Intercepted Dispatch de Sir Thomas Moore : « If the Marseillois Hymn could command Such audience, though yell’d by a Sans-culotte crew » (« Si l’hymne La Marseillaise a su fédérer un tel public, bien que chanté par un groupe de Sans-culotte »). Si la plupart des Français et de ceux qui témoignent de leur solidarité avec la France ne chantent plus cet hymne dans un esprit révolutionnaire, les idéaux qu’il exprime, notamment se libérer de la peur et de la tyrannie, nous parlent directement et montrent également que, au-delà du temps et des interdictions, cet hymne mérite encore d’être respecté et apprécié.