12.07.2016

Synesthésie

Synesthésie – Mot du jour - EVS Translations
Synesthésie – Mot du jour – EVS Translations

Ne vous a-t-il jamais traversé l’esprit que la musique pouvait avoir une couleur ou même une forme particulière ? Ou au contraire, quel son pourrait correspondre à un trait droit clair sur fond sombre ? Plutôt curieux, non ? Eh bien, tenez-vous bien : non seulement ce phénomène existe, mais il s’avère exister depuis quelques temps déjà.

La neurologie moderne définit la synesthésie comme une sensation étant liée à un sens ou à une partie du corps et produite par la stimulation d’un autre sens ou d’une autre partie du corps. Et ce n’est là que la définition du terme, la première mention écrite en langue anglaise remontant à 1891, date à laquelle le terme a été évoqué dans le dictionnaire The century dictionary : « synesthésie, la production d’une sensation à un endroit tandis qu’un autre endroit est stimulé. »

Le mot lui-même est d’origine grecque, syn signifiant « ensemble » et aesthesis « sensation ».

Dès l’Antiquité, ce phénomène a suscité un vif intérêt chez les philosophes et les penseurs qui se posaient la question de savoir si la couleur de la musique était mesurable. Plus tard, Isaac Newton et Goethe (« La théorie de la couleur »), pour ne citer que ces deux personnages illustres, ont évoqué dans leurs études les tons musicaux et les tons de couleur qui partagent des fréquences communes.

De nombreux artistes parmi les plus connus de notre époque ont rapporté avoir fait l’expérience de la synesthésie et effectué des essais multisensoriels des plus variés. Il est un fait que la synesthésie a été une grande source d’inspiration pour les peintres, écrivains, compositeurs et artistes numériques. Nabokov, Kandinsky, Scriabin, Duke Ellington, Nikola Tesla, David Hockney, Pharrell Williams, Charles Baudelaire, Arthur Rimbaud et une foule d’autres artistes ont utilisé la synesthésie dans leurs œuvres. Kandinsky combinait par exemple les couleurs, l’audition, le toucher et l’odorat.

Outre son caractère expérimental et abstrait dans la recherche artistique, la synesthésie a également une utilisation pratique. Une de ses applications les plus surprenantes est la réduction intentionnelle de douleurs obtenue par un programme de réalité virtuelle. Le principe consiste à détourner l’attention du patient qui suit un traitement de ses maux en lui faisant vivre par la synesthésie un scénario de réalité virtuelle, qui elle, ne connaît pas de douleurs.

La synesthésie est involontaire et la plupart des synesthètes ont conscience de leurs expériences particulières dès l’enfance. Ils décrivent ce qu’ils ressentent comme des expériences neutres, voire agréables. Les trois formes les plus communes sont la synesthésie graphèmes-couleurs où les graphèmes (lettres de l’alphabet et nombres) sont perçus colorés, la seconde est la chromesthésie où les sons sont associés aux couleurs et la troisième est la synesthésie de séquences spatiales où des séquences numériques sont perçues comme des points dans l’espace, plus ou moins proches.

Un type très peu répandu, la synesthésie lexicale-gustative, décrit la relation entre les sons de la parole et les expériences sensorielles qu’ils évoquent. Les synesthètes ont des sensations de goûts différents dans la bouche lorsqu’ils entendent certains mots ; le terme Brexit pourra alors par exemple avoir la saveur du citron.