25.06.2015

Procrastination – Mot du jour

« La dernière minute est la meilleure des motivations. » La procrastination a été qualifiée de « maladie des temps modernes » en 1992 et les recherches ont prouvé que plus une société est industrialisée et technologiquement avancée, plus elle est confrontée au problème de la procrastination.

Il s’agit là d’un phénomène contradictoire de la vie contemporaine : alors que le monde semble ne jamais dormir et que le progrès est impossible sans la capacité de faire plusieurs choses à la fois, le phénomène de procrastination semble prendre de l’ampleur.

Certains accusent Internet de renforcer les dangers de la procrastination et le désignent comme la cause principale de notre perte de temps, tandis que d’autres y voient la source de son remède grâce aux nombreux conseils et d’astuces qu’on y trouve pour y échapper.

Dans la langue de l’Égypte ancienne, deux verbes faisaient référence à la notion de procrastination : l’un désignait le fait d’éviter des efforts déplaisants et l’autre la mauvaise habitude de paresser dans la réalisation de tâches importantes.

Le mot procrastination est entré dans la langue anglaise en passant par le français et l’emprunt du latin procrastinare, composé de pro qui signifie « en avant » et de crastinus qui signifie « du lendemain ». La promesse d’un « autre jour » est au cœur de l’origine de ce mot et de son sens, à savoir : toujours remettre au lendemain. Comme tout le monde le sait, demain est un endroit magique où se trouve 99 % de notre potentiel.

Quand le mot procrastination est entré dans la langue anglaise, il suggérait le phénomène classique d’inaction dans des moments critiques. On trouve sa première apparition écrite dans The Union of the Two Noble and Illustre Families of Lancastre and Yorke d’Edward Hall où l’auteur parlait de la « procrastination des tâches et de la prolongation du temps. »

De toute évidence, à cette époque, la procrastination était considérée par certains comme une habitude positive, comme l’écrivit John Banister dans The history of a man en 1578 : « la procrastination saine et nécessaire de la vie », puis William Lithgow dans son carnet de voyage en 1632 où il mentionnait « les bienfaits de la procrastination ».

La procrastination a également eu un sens religieux, désignant le fait de remettre à plus tard la repentance et la confession des pêchés, susceptible de mener à la damnation. Cependant, le dogme religieux ne tarda pas à changer du fait des intérêts commerciaux et la procrastination fut considérée, avant tout, comme une menace pour le bien-être financier de quelqu’un. En 1603, dans The generall historie of the Turkes, Richard Knolles remarquait que « la plupart des commerces riches ne peuvent pas tolérer la procrastination ni le retard. »

En 1742, à l’époque de la nouvelle ère du capitalisme, Edward Young observait que « la procrastination est la voleuse du temps ; année après année, elle vole jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien ».

Quelques années plus tard, Philip Stanhope, Comte de Chesterfield, déclara, non sans audace : « point d’oisiveté ni de paresse, pas même un léger retard ; ne renvoyez jamais au lendemain ce que vous pouvez faire le jour même. » (« No idleness, no laziness, no procrastination; never put off till tomorrow what you can do today. »)

Ben Franklin aurait formulé un proverbe similaire repris non sans humour par Mark Twain dans sa célèbre citation, véritable leitmotiv de chaque adepte de la procrastination : « Ne jamais remettre au lendemain ce que l’on pourrait faire le surlendemain. »

Il existe en anglais un autre terme pour désigner le fait de remettre quelque chose au surlendemain, voire à plus tard encore. Dans ce cas, les Anglais n’utilisent pas le verbe « to procrastinate » mais « to perendinate ».